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Aurore Domont (Media Figaro) : « Avec le nouveau TV Magazine, nous repartons d’une page blanche »

Aurore Domont (Media Figaro) : « Avec le nouveau TV Magazine, nous repartons d’une page blanche »
 
Interview du lundi. Avec 26 millions de lecteurs par mois, selon One Next Global de l’ACPM, Le Figaro est l’un des leaders des groupes d’informations. Fort de ces audiences et s’appuyant sur une offre très diversifiée, la régie Media Figaro poursuit son développement avec le lancement d’une télévision hertzienne et d’une radio numérique. La filiale du groupe Dassault prépare son déménagement dans un nouvel immeuble qui se veut être le symbole de sa transformation. La fin du contrat entre TV Magazine et la PQR remet-il en cause la stratégie ? Aurore Domont, présidente de Media Figaro est l’invitée du lundi de 100%Media.
 
100%Media : Quel bilan faites-vous de cette année 2022 pour Media Figaro ?
 
Aurore Domont : Si je devais la résumer en trois mots : responsabilité, transformation et créativité !
Responsabilité car 2022 a été une formidable année pour nos activités print. Nous nous réjouissons d’avoir été les porte-paroles de grandes campagnes d’engagement : plus de 395 ont été diffusées dans nos médias. Notre responsabilité était d’en mesurer la perception auprès de nos publics afin d’apporter toujours plus d’enseignements et de conseil à nos clients, annonceurs et agences. C’est la vocation du Baromètre de la Communication Responsable initié en septembre 2020.
Transformation sur le digital : après deux années de croissance exceptionnelle, nous constatons une relative stabilisation avec un deuxième semestre moins dynamique, impacté par le ralentissement des annonceurs de la grande consommation. Un marché en constante mutation, réglementaire et technologique, et qui nous invite à une permanente transformation ! 
Enfin, créativité car sur notre troisième pilier, le contenu, 14H réalise une année record avec plus de 400 OPS. Complémentaires aux campagnes publicitaires classiques, ces stratégies de contenu omnicanales tirent profit de la richesse éditoriale de nos médias et de la grande inventivité de nos équipes. 
Une très belle année 2022 donc, qui est le fruit de la transformation de notre modèle, mais surtout de l’excellence de nos collaborateurs et de la richesse de leurs expertises. 
 
100%Media : Le Groupe Figaro bouge et un projet de déménagement est en cours. Où en êtes-vous ?
 
A. D. : Nous déménagerons au printemps 2023 à quelques centaines de mètres des locaux actuels. Nous restons ancrés au cœur de la capitale : c’est important pour la qualité de vie de nos collaborateurs et pour les jeunes talents que nous recrutons. Ces futurs locaux seront plus adaptés aux nouveaux modes de travail, le télétravail évidemment, mais surtout aux nouveaux modèles de collaboration. Se retrouver physiquement au travail pour être chacun derrière son écran ne fait plus vraiment sens : ces futurs espaces ont été pensés pour favoriser les échanges, l’idéation, la créativité. Enfin, ce futur immeuble labellisé HQE répond parfaitement aux exigences de performance environnementale et énergétique.
 
100%Media : La fin du contrat avec la PQR pour TV Magazine, et le lancement de Diverto, vous a obligé à repenser votre offre. Vous allez (re)lancer la marque TV Magazine en janvier pour votre offre week-end avec Le Parisien. Comment avez-vous transformé votre offre ?
 
A. D. : Lancer un nouveau magazine est un défi incroyable qui mobilise toutes les énergies de l’entreprise. J’ai eu la chance de participer à quatre lancements : Be, Néon, F et aujourd’hui TV Magazine. Nous repartons finalement d’une page blanche, affranchis des nombreuses contraintes liées à la réalisation d’un magazine qui accompagnait plus de 50 titres de presse quotidienne. Ce lancement a toutefois un aspect inédit : réinventer l’expression d’une marque historique, à laquelle les Français sont si attachés.
Nous l’avons pleinement mesuré en réalisant une grande étude auprès d’eux qui nous a permis de construire un projet éditorial en réponse à leurs attentes : ils exigent plus de choix, de sélectivité, de recommandation, de critique.
Nous avons donc recentré le magazine sur sa fonction première : la passion des écrans et la volonté d’offrir à nos lecteurs « un guide pour les éclairer dans la jungle des programmes » comme aime à le dire François Aubel, nouveau rédacteur en chef du magazine, en plus de ses fonctions de rédacteur en chef culture-télé du Figaro. En découle un nouveau traitement éditorial avec une approche contenu first en 360.
Nous allons désormais traiter un même sujet sous plusieurs angles et les ventiler au sein de notre écosystème : le quotidien, le magazine, le site Internet dont la verticale TV Magazine réunit chaque mois 6,5 millions d’internautes, mais aussi les émissions comme le Buzz TV. Nous tirons également parti des expertises de la rédaction du Figaro pour amener plus de journalisme au sein de TV Magazine. Par exemple, si nous voulons traiter d’un documentaire sur la justice en France, nous ferons appel à Stéphane Durand-Souffland, chroniqueur judiciaire du Figaro. Nous nous réjouissons enfin du partenariat avec le Parisien : c’est l’alliance de deux grands quotidiens d’information. Dès janvier 2023, TV Magazine sera donc diffusé dans l’offre week-end du Figaro et du Parisien à 530 000 exemplaires. Il s’agit d’une offre unique qui permet notamment de rectifier la sous-pondération structurelle des magazines télé sur la région Ile-de-France.
 
100%Media : Sur le print, vous multipliez les opérations spéciales avec les grandes marques. En quoi Le Figaro (papier) est-il devenu incontournable sur ce type d’opérations par rapport à vos concurrents ? A quel(s) besoin(s) des marques cela répond-t-il ?
 
A. D. : Le Figaro est la plus grande tribune d’influence et de réputation : les dirigeants d’entreprise, les hommes politiques, les grandes marques s’expriment dans ses colonnes… C’est aussi la marque média plébiscitée par les key opinion leaders et les audiences à fort pouvoir et vouloir d’achat. Le Figaro est donc logiquement l’écrin privilégié des grandes marques, et notamment des maisons de luxe, quand elles souhaitent rendre incontournable un événement : une ouverture de lieu, une nouvelle plateforme de marque, un anniversaire, un grand engagement RSE, le lancement d’une gamme ou d’une innovation… Ces opérations ont finalement un double rôle : la notoriété en événementialisant une actualité de marque, et la considération car ces formats sont conçus avec une grande finesse et créativité pour marquer nos lecteurs, tout en respectant l’ADN de notre partenaire. 
 
100%Media : Groupe Figaro se revendique comme la 1ère marque d’information omnicanale (33 millions de VU / mois, selon l’ACPM). Comment avez-vous construit cette offre très singulière dans le paysage ?
 
A. D. : En nous centrant sur les usages de nos audiences et en développant toujours des innovations et nouvelles écritures en lien avec leurs attentes. Nous avons été les premiers à lancer des déclinaisons magazines pour accompagner notre quotidien le week-end (en 1978 pour Le Figaro Magazine et en 1980 pour le Madame), parmi les premiers à lancer notre site d’information dès 1999… Aujourd’hui, Madame Figaro réunit par exemple près de 400 000 personnes sur TikTok et a dropé en septembre dernier 800 NFT épuisés en 24h. Nous déployons en 2023 la marque Figaro sur de nouvelles frontières audiovisuelles en nous appuyant sur les dernières technologies : la Fast TV, la DAB… Aujourd’hui comme hier, la clé du succès est d’être là où sont nos audiences, de penser la distribution de nos contenus de façon nativement omnicanale, et de toujours adapter les écritures à leur contexte de consommation et aux grammaires spécifiques d’un support. 
 
100%Media : Parmi les projets de 2023, vous lancez une TV sur le hertzien, une radio en DAB+ et de nouvelles éditions en régions. D’autres développements sont-ils envisagés ?
 
A. D. : Un projet très enthousiasmant mais pour lequel nous gardons encore un peu de secret et de mystère. Nous en reparlerons très rapidement !
 
100%Media : Vos activités adtech sont souvent méconnues. Pourquoi avoir internalisé cette activité ?
 
A. D. : L’ambition de Media Figaro est d’offrir une approche digitale full funnel, du branding à la performance. Grâce à la force de nos contextes et à la créativité de nos formats, nous répondons efficacement aux enjeux de branding. Et il était clé de garantir la même efficacité et la même délivrabilité pour des campagnes gérées à la performance. Nous avons donc opéré en deux temps : en faisant tout d’abord l’acquisition d’actifs perf comme CCM Performance ou ZBO, puis en intégrant ce savoir-faire au sein de la régie. Aujourd’hui, plus de 200 personnes travaillent sur des dispositifs exclusivement dédiés à la performance au sein du groupe et le pôle tech de la régie regroupe différents métiers : head of opération, chef de projets digitaux, yield, adops, BI… L’internationalisation de ces profils clé est ce qui nous a permis de construire un modèle unique, à même de répondre à toutes les stratégies digitales.
 
100%Media : La fin des cookies est le grand sujet du moment. Comment êtes-vous préparé ?
 
A. D. : La fin des cookies, c’est avant le retour du contexte ! Et à ce titre, le Groupe Figaro (avec ses 450 journalistes produisant chaque jour des centaines de contenus sur 80 thématiques éditoriales) me semble plutôt bien armé. C’est toutefois un enjeu majeur dont la véritable difficulté réside dans la scalabilité et l’adoption de solutions alternatives. Nous travaillons en cela sur plusieurs axes. Premièrement via notre DMP 1PLUSX, et une approche hybride cookies et sémantique, nous pouvons adresser et cibler les environnements cookieless. Nous travaillons également avec différentes solutions ID universelles telles que ID5, UID Xandr, PPID de Google pour reprendre de la valeur. Nous nous appuyons enfin sur nos abonnés numériques et nos environnements logués. Nous restons en veille permanente et à l’écoute de toutes les initiatives qui fleurissent sur le marché (plus de 80 initiatives), avec la conviction que la solution réside dans l’association et la scalabilité. 
 
100%Media : Le Digital Ad Trust est en pleine réflexion et va se transformer en intégrant une partie transition écologique. Quelle est votre position ?
 
A. D. : C’est un magnifique projet du SRI et nous participons activement aux travaux en cours, de la même façon que nous soutenons tous les projets de la filière en faveur d’une communication plus responsable. Le futur Digital Ad Trust devra répondre aux enjeux écologiques qui nous font face et valoriser des offres digitales qui conjuguent efficacité et responsabilité. Il a vocation à concerner tout l’écosystème digital avec des critères communs à tous et nous nous en félicitons. C’est le début d’une grande démarche responsable qui reflète d’ailleurs parfaitement notre philosophie du digital : moins d’expositions, moins d’émissions, mais plus d’attention. Notre innovation Greenview, en partenariat avec la start-up Vidmizer, en est un parfait exemple : elle permet de réduire de moitié le poids des campagnes vidéos, et donc son impact carbone, tout en en conservant la qualité de la vidéo et en respectant l’expérience utilisateur. 
 
100%Media : Vous développez votre propre calculette d’empreinte écologique. Allez-vous adopter le futur référentiel souhaité par l’interprofession ?
 
A. D. : Nous avons fait le choix d’un outil commun aux trois premiers groupes publishers : Les Echos Le Parisien Médias, M Publicité et Media Figaro. Ce choix s’est très vite imposé en raison de la très grande proximité entre nos trois groupes et parce que nous voulions nous doter d’un outil partagé, qui puisse donner aux annonceurs une mesure unique de l’impact de leurs campagnes. Cette méthodologie, élaborée avec Ekodev, s’appuie sur les différents référentiels du marché et les sources officielles comme l’ADEME pour les facteurs d’émission notamment, ou encore sur le cahier des charges édité par le SRI pour la partie digitale. Nous participons par ailleurs activement aux travaux et échanges en cours au sein de l’interprofession : nous sommes présents au sein de la commission RSE du SRP, du COPIL Engage climat du SRI, et échangeons avec l’UDECAM. Notre démarche se veut enfin open source : si d’autres groupes souhaitent reproduire la méthodologie de notre calculette carbone, nous la partagerons très volontiers. Nous sommes au début de l’histoire et avançons avec humilité mais dans une grande volonté de dialogue.
 
100%Media : Quelle est votre vision du marché publicitaire pour 2023 ?
 
A. D. : Il y a évidemment de nombreuses incertitudes compte tenu de l’inflation actuelle et des risques de récession. Nous observons attentivement l’évolution des indicateurs macroéconomiques et les prévisions publicitaires. Mais nous avançons aussi avec confiance car j’aime à rappeler l’une des leçons de la période Covid : les entreprises qui, par le biais de la communication, ont pérennisé le lien avec les consommateurs et sont restées proches de leurs clients, sont aussi celles qui sont sorties le plus rapidement de la crise. Bien sûr, les consommateurs seront sensibles à la dimension prix dans un contexte de tension sur le pouvoir d’achat, mais la mission, la responsabilité, les engagements des marques continueront à impacter, plus profondément encore je le crois, la réputation des entreprises et le choix des consommateurs. Cultivons l’optimisme ! Car je reste persuadée que la communication a un rôle cardinal à jouer dans l’avènement d’un modèle de consommation plus responsable et dans le renforcement du lien entre consommateurs et entreprises.
 
Propos recueillis par François Quairel

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