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Elargir les indicateurs de performance du brand content stratégique par Daniel Bô et Pascal Somarriba – Episode 1

Elargir les indicateurs de performance du brand content stratégique par Daniel Bô et Pascal Somarriba – Episode 1

Les critères d’évaluation du brand content stratégique sont nombreux et son efficacité se constate dans le temps. Se limiter aux effets directs sur les ventes ou l’image, c’est passer à côté de potentialités essentielles. Comprendre les atouts du brand content requiert de nouveaux indicateurs inscrits dans la durée. Cet article en deux parties vise à inventorier tout ce qui compte, mais ne se mesure pas toujours.
 
Pour étudier l’efficacité du brand content, la tentation est forte de recourir aux outils issus de la publicité. Pour les messages publicitaires focalisés sur l’incitation à l’achat (innovation, opportunité commerciale, etc.), il est légitime de mesurer l’impact direct sur les ventes. Le brand content, lui, n’est pas dans une démarche de persuasion immédiate : le contenu de marque participe au rayonnement social et culturel de la marque, dont l’achat n’est qu’une retombée. D’où l’importance de trouver les critères mais aussi le langage permettant de prendre en compte les richesses suscitées par le brand content.
 
La qualité éditoriale au service d’une expérience mémorable
Dans le domaine des contenus de marque, seul l’enthousiasme compte car l’expérience doit être mémorable. Et comme il faut être passionné pour être passionnant, seule une forte implication de la marque pourra susciter l’engagement du public. Les premiers facteurs sont ainsi liés à l’évaluation de la qualité des contenus et diffèrent en fonction de leur nature : 
Les contenus informatifs sont jugés sur des critères de crédibilité et d’expertise ;
Les contenus pratiques s’évaluent en termes de valeur d’usage ;
Les contenus ludiques et divertissants sont jugés selon leur originalité, leur créativité et les émotions produites. 
Quels que soient les contenus, c’est la richesse et l’intensité de l’expérience qui compte. 
Dans un contexte de surabondance des contenus gratuits, le rapport qualité/temps devient un indicateur clé. Il faut pouvoir toucher le public au moment où il est disponible en lui proposant la durée de contenu adaptée. Il s’agit alors de tenir compte de sa réceptivité et de mettre à disposition le contenu au moment optimal. 
La diffusion sociale d’un contenu est révélatrice de la qualité de l’expérience : d’où l’intérêt de suivre l’interaction avec les récepteurs, manifestée par le bouche à oreille, le partage, la réappropriation ou de l’approbation via les réseaux sociaux.
 
De l’image à la performativité
Les marques sont habituées à suivre l’évolution de leur image. Elles peuvent constater l’impact des opérations de brand content via un tracking de l’image en externe (notoriété, modernité, proximité, préférence, intention d’achat…) et en interne (motivation, mobilisation, fierté…). Ces indicateurs sont très utiles mais restent superficiels. 
Depuis peu, on assiste à l’émergence d’indicateurs plus dynamiques tels que VIBE™ ou les marques irrésistibles, qui évaluent si la marque est inspirante, visionnaire, audacieuse, stimulante…. Le brand content permet en effet d’enrichir le sens d’une marque et de nourrir son attractivité culturelle. 
Il contribue à rendre la marque performative, notion clé développée dans le livre Brand Culture. Les marques sont des ressources symboliques qui participent de la définition de l’identité de l’individu : la consommation est un terrain de jeu où s’exprime la singularité. La consommation est signifiante, culturalisée par l’identification à des marques qui sont des modèles identitaires, au même titre que le genre, le lieu d’habitation ou le métier. Pour répondre à la question «Qui suis-je ?» et être reconnu socialement, l’individu doit prendre conscience de ces modèles auxquels il adhère. Préférer telle marque c'est «performer», consciemment ou non, la marque comme modèle culturel. En tant qu’expression éditoriale de la brand culture, le brand content stratégique a vocation à expliciter ces modèles. Certains contenus ont de plus une fonction plus spécifique d’empowerment et permettent à leurs utilisateurs de démultiplier leur potentiel par la performation, l’application concrète du contenu. 
 
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Brand content et association à la marque
Un contenu formidable et très visible ne vaut que s’il est bien associé à la marque qui le produit. Cette association tient à une série de facteurs à suivre de près :
Adéquation : Suppose que le public puisse comprendre la relation, qui unit marque et contenu et justifie l’opération sur le plan du sujet, des valeurs, du sens, avec imbrication ou fusion des codes stylistiques.
Articulation : Suppose que le contenu ne soit pas conçu comme un objet isolé mais soit intégré et relié aux autres manifestations de la marque, à un contexte pertinent, et à l’achat. Le contenu sert à unifier la marque.
Implication : Le récepteur doit sentir la sincérité et l’importance de l’investissement de la marque dans le contenu. 
Masse critique : Suppose une stratégie dans la durée (Vs one shot) avec une densité et une quantité de contenus associés à la marque diffusés sur une multitude de canaux et remplissant diverses fonctions. 
 
L’efficacité média et les indicateurs de visibilité
Les KPIs (Key Performance Indicators) communément utilisés par les marketeurs pour le brand content portent sur l’efficacité média : nombre d’impressions, de vues, part de voix, taux de rebond, profil démographique touché. Les outils utilisés par les médias (Vu-Lu en presse, mesure d’audience et satisfaction en TV, taux de churn sur les abonnements, etc.) sont totalement transposables aux contenus de marque.
Le monde des médias est un théâtre d’influence, où la marque doit asseoir son autorité et s’imposer comme référente sur son territoire éditorial. L’enjeu est alors d’être repris par des relais (gratuits ou payants) qui propagent ses contenus, des médias dont l’influence dépasse celle de la marque. Sur le marché compétitif des médias, la marque doit donc s’inscrire dans des flux d’audience, conquérir les faveurs du public et des influenceurs et faire adhérer chaque communauté cible. 
Red Bull, par exemple, est soucieux d’être bien accepté au sein de chaque communauté sportive ou artistique avec laquelle la marque travaille. Pour cela, elle établit des relations privilégiées avec les athlètes de référence.
Avant d’investir un territoire en digital, on peut faire une étude de SEO (Search Engine Optimization) sur le potentiel de requêtes et vérifier le territoire sémantique couvert par le contenu de marque.
 
Mix d’opérations avec des rentabilités différentes
Dans une stratégie de brand content, la marque a besoin d’opérations qui vont construire sa légitimité et installer son territoire. Certaines de ces opérations ne sont pas directement rentables mais sont indispensables. 
Pour développer du contenu sur la thématique de l’innovation locale, PagesJaunes a lancé un blog avec plusieurs centaines de cas. Cet observatoire des meilleures idées du monde entier n’a pas vocation à développer du chiffre d’affaire directement. Il a pour but de constituer une base de données d’exemples, d’explorer le sujet et d’atteindre une masse critique, signe de l’intérêt de PagesJaunes pour ce sujet. Dans un deuxième temps, PagesJaunes envisage d’autres actions dont l’efficacité commerciale sera beaucoup plus évidente : contenus organisés par secteur d’activité mobilisables par les commerciaux, livres blancs permettant de générer des leads, conférences régionales avec des prospects ou des clients, etc. Bref, il y a un investissement de départ indispensable pour construire une maison en pierre et non en paille.
Sur la thématique «Smarter Planet» développée depuis quelques années par IBM, on voit cohabiter des initiatives «désintéressées» et d’autres très commerciales. D’un côté, IBM développe des documentaires ou de la recherche fondamentale sur l’intelligence des réseaux. En parallèle, la marque propose des conférences à vocation commerciale à partir des mêmes thèmes.
 
Les KPIs business
Le contenu est potentiellement très efficace sur les ventes. Il est efficace indirectement en donnant du sens et de la substance aux marques. Il peut être efficace directement en favorisant la création de trafic, la vente, le e-commerce, la fidélisation, l’animation commerciale. Un exemple idéal est l’émission Recipe to Riches en Australie avec Woolworth, où les spectateurs participent à l’élaboration et au choix des plats y compris par leurs achats en magasin.
Les contenus sont d’abord le moyen d’entrer en relation avec un prospect sans l’agresser par une approche directement commerciale. Une mini-série comme Les Colocs ou We are the Teuf de BNP Paribas constitue un moyen d’aller au devant du public jeune visé par la banque. Une fois le lien établi, la marque peut facilement faire son offre commerciale. Le brand content est donc un moyen «soft» de réinventer la relation commerciale ; il permet de créer de la curiosité, d’établir un contact, de passer par les centres d’intérêt de ses interlocuteurs.
Pour vendre un produit anti-poux, il est recommandé de publier des articles expliquant comment se débarrasser des poux. Le contenu devient un véhicule vers l’achat, l’instigateur et l’accélérateur de la conversion. En BtoB, l’échange de contenus est au cœur de la relation. La conversion «content to business» est omniprésente avec la génération de leads ou la crédibilisation par l’expertise. Le contenu renouvelé évite le défaut de saturation qu’on connaît avec la surpression publicitaire.
La production de contenus constitue une activité qui peut avoir sa propre rentabilité. Lorsque Picard vend un livre de recettes via ses propres magasins, la publication est directement rentable. Lorsque Red Bull vend ses programmes aux chaînes de télévision, on tend vers une diversification des activités avec un business model potentiellement autonome. Mais cette position est limitée aux entreprises qui ont une maturité en matière de brand content.
 
Retrouvez cet article dans «Le brand content stratégique», prochain livre blanc de QualiQuanti qui sortira en mai 2014.
 
Daniel Bô, PDG de l’institut d’études QualiQuanti et Pascal Somarriba, PDG de Via Alternativa

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